Le Portrait de Massinissa.


Massinissa portrait Les portraits que nous possédons de Massinissa, par quelques sculptures et par les monnaies qu'il fit frapper, montrent un personnage dont les traits étaient réguliers. Il portait une abondante chevelure bouclée, ainsi qu'une barbe fournie. Il portait le diadème sur le front, signe de sa royauté.

Massinissa était d'une vigueur exceptionnelle. Il est décrit comme possédant un corps athlétique, d'une grande beauté, et surtout comme une force de la nature. Il pouvait rester une journée entière debout ou à cheval, sans prendre de repos, et octogénaire, il sautait encore sans aide sur son cheval, qu'il montait le plus souvent à cru, sans selle, accessoire qu'il délaissait le plus souvent. Il bravait le froid et la pluie tête nue. A l'âge de 88 ans, il commandait encore son armée dans la bataille contre les carthaginois, et le lendemain, Scipion le trouva sur pied devant sa tente.

C'était un homme plein de contraste. A la guerre, il se montrait un rude guerrier, sans peur et sans scrupule. Il supportait comme le dernier de ses soldats les privations et la fatigue, et il avait coutume de s'entourer d'une meute de chiens féroces qui assuraient sa garde rapprochée et n'obéissaient qu'à lui. On aurait dit un chef de clan, et non le grand roi qu'il était. Mais lorsqu'il recevait dans son palais de Cirta, tout était raffinement. Son palais était, parait-il, une merveille architecturale. Les meilleurs repas y étaient servis dans de la vaisselle en argent, les tables étaient garnies de corbeilles d'or fin. Pour ses réceptions, il organisait des concerts auxquels participaient les musiciens les plus renommés, notamment ceux venus de Grèce. Les plus grands poètes venaient y déclamer leurs vers. Il était en effet très cultivé et passionné d'art. Pourtant, quand il n'organisait pas de banquets pour quelques hôtes de marques, sa vie était frugale et modeste. Un morceau de pain et du lait constituaient son repas habituel.

Massinissa adorait les enfants. Sa descendance fut abondante, puisqu'il n'eut pas moins de 44 fils - on ne sait pas combien il eut de filles - et le dernier naquit alors que Massinissa était âgé de 86 ans. Loin de le répudier, comme il était d'usage pour les hommes âgés à cette époque, il fut très heureux de cette naissance, qu'il fit célébrer par une grande fête. On ignore également le nombre de ses épouses, même s'il est d'évident qu'elles devaient être nombreuses -. A sa mort, dix de ses fils étaient encore vivants. Il avait coutume de garder auprès de lui pendant plusieurs années ses fils et ses filles, même durant ses campagnes de guerre. A des gens qui venaient acheter dans son royaume des petits singes destinés à être des animaux de compagnie pour de riches oisifs, il s'écria, étonné : "Mais les femmes de chez vous ne vous donnent donc pas d'enfants ?".


Massinissa parlait le phénicien, dont il fit la langue officielle de son état. Il en connaissait parfaitement la culture, qui était une des plus avancée de l'époque, autant dans le commerce, l'industrie que l'agriculture.

Sous son règne, l'expansion économique fut remarquable. Il développa le commerce, jusque dans des pays lointains, puisque que son royaume commerçait activement avec Rhodes, la Grèce et même l'Orient lointain. Il imposa une sécurité sur les routes commerciales inconnue jusqu'alors, tant sur terre que sur mer.

En s'inspirant du savoir phénicien, il améliora l'agriculture, qui pourtant était déjà performante pour l'époque, les berbères ayant toujours su, depuis des temps très anciens, exploiter le sol avec une grande habileté. Il semble qu'il fit introduire de nouveaux outils, mais c'est sans doute son respect du peuple qui fit son succès. Sous son règne, les paysans n'étaient pas dans la misère. Son royaume était un grand exportateur de céréale et aussi de bois de grande qualité.

Dans tous les territoires qu'il annexa, il fit régner la sécurité et il en assura le développement à un point tel que la prospérité du royaume fut immense. Soucieux du peuple, il ne l'écrasa jamais d'impôts. Il n'eut jamais à faire face à des révoltes populaires. C'est d'ailleurs là un de ses plus grand succès : de 174 à 150 avant JC, lorsqu'il reconquit les territoires berbères alors sous domination carthaginoises, il les unifia. Il les sédentarisa aussi, parce que sous Carthage, certaines tribus avaient été contraintes au nomadisme. C'est cette grande efficacité d'administrateur qui fit sa puissance. Loin d'être un tyran, c'était un monarque éclairé.

Il fut toujours respectueux de sa parole comme de ses alliances. Quand Rome fit appel à son aide, il ne ménagea pas ses efforts pour lui fournit des hommes ou des provisions. « Pendant la guerre contre Philippe de Macédoine, Antiochus et Persée, il fournit aux romains du blé et de l'orge. Il mit aussi à leur disposition, lors de ces guerres 1.000 cavaliers et 22 éléphants qu'il plaça sous le commandement de son fils Misagène (Masucan), son autre fils Masgaba le représenta aux fêtes célébrant leur triomphe contre Philippe de Macédoine... Contre les ligures il offrit 800 cavaliers ». Il en fit de même contre les Ibères. A Licinius il donna de nombreux éléphants malgré son besoin contre Carthage...

Tombeau de Massinissa... Il fut un souverain très aimé. A sa mort, ses sujets élevèrent un mausolée imposant à quelques kilomètres de sa capitale Cirta et un Temple à Dougga lui fut dédié. Il était considéré comme un Dieu. Encore aujourd'hui, il reste pour les Berbères le symbole d'un roi exemplaire.

Seul Jugurtha, qui d'ailleurs était un de ses descendants, eut un rayonnement comparable.