La Politique de Massinissa.

Massinissa fut également un administrateur remarquable. Il amassa un énorme trésor, qui lui permit d'entretenir une armée. Pour donner une idée de l'accroissement de sa richesse, il suffit de considérer la montée en puissance de ces troupes. En 202 avant JC, celle-ci ne comprenait que 4000 cavaliers et 6000 fantassins, lorsqu'il prêta main forte à Scipion. Cinquante ans plus tard en 150 avant JC, il se présenta à la bataille de Zama contre Carthage à la tête d'une armée de plus de 50 000 hommes, qui comportait une impressionnante cavalerie et aussi un redoutable corps d'éléphants dont une partie provenant des prises carthaginoises et l'autre partie était issue de ses propres élevages.

La force du royaume a dépendu de l'unité du peuple massyle et de la cohésion des tribus autour du souverain. Les tribus ont fourni au roi des contingents et Massinissa a su organiser une armée régulière soumise à son autorité. L'organisation de cette armée a été conditionnée par celle des finances.

Le royaume numide fut un agrégat de grandes tribus ou confédérations qui formaient les unités politiques fondamentales. La tribu possédait des marchés, quelques villages; la ville était organisée en dehors de la tribu, elle était administrée par un magistrat mais aussi par une assemblée du peuple qui détenait la souveraineté locale.

Durant ce long règne, Masinissa oeuvra inlassablement pour édifier un état moderne comparable par son organisation et sa prospérité à celui que connut Carthage.

A la tête de chaque province il plaça un gouverneur et à la tête de chaque tribu un « Amokrane » (le chef). Son conseil, formé de dix personnes, le seconda efficacement dans sa politique et son administration générale. Au nombre de ces dix conseillers il avait trois de ses fils : Micipsa qui le suppléait en plusieurs affaires, Gulussa, chargé de la conduite des armées et Mastanabal chargé du trésor royal. Il mit en circulation une monnaie frappée à son effigie, « avec de traits réguliers, un oeil largement ouvert sous un sourcil assez épais, des cheveux abondants et boudés, une barbe s'allongeant en point


On sait malheureusement assez peu de choses sur le système politique de son royaume. Il semble qu'il se soit appuyé sur l'ancien système démocratique - les assemblées d'hommes qui décident des affaires du village - hérité par les phéniciens de la Grèce Antique, et sur les tribus. Selon certains auteurs, il s'inspira du système carthaginois. Ceci signifie qu'il devait probablement exister une assemblée constituée de représentants des tribus pour le conseiller.

En politique étrangère aussi, il fut également très brillant. Tous les traités passés étaient scrupuleusement respectés. Même Rome n'osait pas remettre en cause son autorité, bien consciente qu'il valait mieux compter avec un allié d'une telle puissance, fut il encombrant, que de s'en défaire. S'il fut son allié, il n'en fut jamais un vassal, bien au contraire, et ceci grâce à sa très grande habileté diplomatique.

Il entretint des relations avec tous les pays méditerranéens : « le petit prince massyle était devenu un souverain très puissant, célèbre dans tous les pays de la Méditerranée, depuis l'Espagne, qui se souvenait des exploits de sa jeunesse, jusqu'à l'Orient, lointain, où il se ménagea des amitiés : Nicomède qui devint roi de Bithynie très peu de temps avant la mort de Masinissa proclamait que celui-ci lui avait témoigné une affection et une bienveillance paternelles. Massinissa fut attentif à plaire, aux grecs, dispensateurs de renommée et commerçants avisés avec lesquels on pouvait traiter de grosses affaires.

Il offrit à Rhodes du bois et de l'ivoire; à Delos, du blé, dont la vente rapporta quelques milliers de drachmes au temple d'Apollon. Trois statues au moins furent élevées dans l'île: une par un marchand athénien qui se disait son ami, une autre par un rhodénien, qui était probablement aussi un très riche marchand, une troisième par ce Nicomède que nous venons de mentionner. Il eut des égards pour l'historien Polybe, quand celui ci vint lui rendre visite, en compagnie de Scipion Emilien.

Sur le plan de la politiqure interne à son royaume, Massinissa proclama que "l'Afrique revient aux africains", n'acceptant aucune ingérence étrangère dans les affaires de son état. Il refusait totalement la corruption, pourtant si répandu dans l'antiquité, et notamment en politique étrangère. C'est cette intégrité sans faille qui lui permit de tenir tête à toutes les autres nations, à commencer par l'Empire Romain.